mardi 25 mars 2008

Parlons technique

Faudel parle de perte d’inspiration durant cinq ans. Je parlerai de perte de manager. En fait perte de « ??? », car définitivement en France le Manageur est un acteur qui n’est pas compris par l’organisation commerciale.

Agent, tourneur, manageur ces trois termes sont confus dans l’esprit de beaucoup. Ils réfèrent à des fonctions distinctes, des publics et des moments différents.
L’agent est un « placeur ». Il place un comédien dans un film, un modèle dans un spot télé, un intervenant dans une conférence, un accordéoniste dans un orchestre de bal…
Il est rémunéré en récupérant 15% du cachet qu’il obtient pour son mandant.
Le tourneur est un vendeur de spectacle. Il propose une réalisation artistique dont il s’assure de la disponibilité et de la fourniture. Il peut être ou non le producteur de ce spectacle, celui qui aura assuré le financement de la réalisation artistique. Il se paye sur la marge qu’il obtient à la revente du spectacle à un promoteur local. Il est l’employeur de l’artiste.
Le manageur est un développeur de marque. Il installe une stratégie qui assure une exposition du nom d’un artiste, ce qui permet ensuite de négocier avec des agents, des tourneurs, des producteurs. Sa fonction est couverte financièrement par le reversement d’un pourcentage des revenus de l’artiste. En payant le manageur, l’artiste devient de fait son employeur. Par conséquent un manageur ne peut pas être le tourneur de son artiste ils seraient alors, employeurs et employés croisés : opération sac de nœuds.

A partir de là accrochez vous, ça vaut son pesant de cacahuètes salées.

Mestar, manageur ne peut être tourneur. Pourtant c’est en permanence son téléphone qui sonne pour demander Faudel en concert. Mestar organise. Dans un premier temps, Appel d’airs sert de tourneur naturel, pour les dates à 3000 ou 6000 francs (450 – 900 €) et ce jusqu’aux limites de sa mission c'est-à-dire le Printemps de Bourges 96 et les dates « Révélations du Printemps de Bourges » qui suivent. Puis ce seront Positiv’Jam et Mad Minute Music, quand les cachets iront jusqu’à 40000 ou 60000 F (6000 et 9000 €).
A l’analyse, les deux tourneurs font principalement office d’administrateurs de tournée. La majorité des dates sont négociées en direct par Mestar, il met en œuvre le spectacle en gérant les musiciens et techniciens nécessaires, il assure la fonctionnalité de l’équipe artistique, coordonne les interventions promotionnelles, prépare les rendez vous avec la presse locale sur chaque date etc. L’expérience acquise en 15 ans de spectacle vivant peut laisser entendre que se monte une structure spécifique dont le premier artiste au catalogue aurait été Faudel (comme le fera de son côté Charles avec l’Olympic et –M-). Par ce biais il était possible de poursuivre les aventures mantaises et d’instiller une dose d’intervenants locaux.
Mais Faudel a besoin de liquidités. A l’approche de 1,2,3 soleils il est de plus en plus sensible au murmure des 23 000€, qu’un tourneur lui propose en cas de signature. Faudel veut du cash, des cachets plus élevés, un intéressement aux résultats. Le prix de vente du spectacle qui était de 400 € passe en quatre ans à peine à près de 25 000 € par date.
Parenthèses : Les sommes que l’on propose aux artistes ne sont jamais des cadeaux. C’est leur propre argent qu’on leur propose de toucher plus tôt. Tu as tant de concerts prévus, que je vais renégocier, je vais gagner tant et toi tant. « Ah tu veux combien maintenant ? » mais pas de problème, c’est sur ton « tant à toi » que je vais avancer l’argent, je te le déduirai lors des comptes de clôture.
Entre Porsche et Mercédès, maisons achetées et sitôt revendues, entre les décotes et la tva sur plus-value, Faudel balancera près de 230 000 € par les fenêtres en 6 mois. Avec les à côtés, il a besoin de fraiche !
Mestar s’oppose à cette solution de tourneur mais déjà l’artiste lui échappe, attrapé par d’autres sirènes. Faudel sort vainqueur du round et demande à Mestar d’organiser au mieux les arrangements de coproduction. Bon an mal an, Faudel touchera cinquante pour cent des bénéfices de la tournée dont il reversera une partie à son manageur selon le contrat initial. Mad Minute Music se sent léser et plaide la récupération des dates que cette structure a négocié. Tout semble malgré tout fonctionner tant bien que mal. Jusqu’au moment fatidique où il faut clôturer les comptes et faire les répartitions. Les choses se compliquent. Le tourneur ne semble plus disposer des fonds pour solder l’exercice.
Attaqué aux Prud’hommes par Faudel, qui se retourne également contre son manageur, le tourneur fait le dos rond en première instance, le manageur est dégagé de toute responsabilité.
Faudel fait appel. Le tourneur a été mis en liquidation et a déposé le bilan.
Le tribunal ne trouvant qu’un tiers opposable à Faudel condamne en Mars 2008 le manageur (employé de fait de Faudel).
Résultat : une structure viable qui aurait pu faire vivre des gens de Mantes et de sa région n’a jamais vu le jour, le tourneur s’est envolé et avec lui les 300 millions de centimes de francs de résultat des tournées, le manageur qui s’opposait à cette situation et dont les intérêts étaient diamétralement opposés, ne touche pas les 15% de son contrat de management de l’artiste, et doit lui verser 10 000 € de dédommagements comme si il était employeur dans le cadre des suites d’un contrat ou il n’était pas décideur ni demandeur, ni prescripteur. C’est quand même à lui que Faudel reproche d’avoir abusé… Ubu ou es tu ?

Ces collaborations cessent lamentablement en 2001. Quelqu’un peut-il me rappeler un fait marquant de Faudel en tournée depuis cette date ?
En Juillet 2007, l’un des deux plus grands producteurs de spectacle de France annonçait par un communiqué de presse la fin de sa collaboration avec l’artiste Faudel. J’en suis encore tout étonné.

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